par Duncan Curtis le 22 Juil 2013, 12:10
Je lis la lettre une fois de plus et j'avoue que j'ai du mal à comprendre. « Orgone », une entreprise dont j'ai entendu parler comme beaucoup de monde, il faut dire que ce n'est pas bien difficile puisqu'ils ont fait le buzz dans les journaux autant que sur internet. Ce que je ne comprends pas c'est ce que cette entreprise peut vouloir de moi, après tout ils font des jeux vidéos, un ancien militaire dans tout ça n'a pas forcément sa place. Voulaient-ils que je teste des jeux vidéos de guerre pour leurs dire si ça ressemble à ce que j''ai vécu sur le terrain ? Sincèrement je ne suis pas certain d'avoir envie de faire cela mais peut-être veulent-ils simplement m'offrir un poste d'agent de sécurité ? Je ne me suis même pas encore trop posé la question, j'ai largement assez à faire comme ça sans commencer à m'interroger sur une entreprise qui m'envoie un courrier pour me demander de venir à un entretien d'embauche. J'ai téléphoné pour dire que je viendrai, je dois bien avouer qu'ils ont des arguments plutôt convaincants mais je crois que je préférerai savoir pour quelle raison ils peuvent être intéressés par mes talents. Cela fait seulement huit mois que j'ai quitté l'armée sur un mauvais coup, le coup de trop apparemment mais ceci est une autre histoire, ce qui est en revanche vrai c'est que depuis ma vie est pour le moins … posée. Une petite maison sans prétention juste à l'extérieur de Miami, un métier d'agent de sécurité dans une petite banque où rien ne se passe jamais sinon quand le vieux Roger vient déposer ses vieilles pièces de cinq cents à montant de mille dollars voir plus. Autant dire que c'est un petit métier tranquille, une petite maison sympathique et pour mettre un peu d'ambiance dans tout ça, l'ancien travail de mon père changé en une passion, fauconnier. Enfin en l’occurrence pas vraiment fauconnier, dresseur d'une chouette et deux aigles, simplement par passion, d'ailleurs ils sont plus libres qu'ils ne le devraient mais curieusement plus fidèles que je ne l'aurai pensé.
Assis sur un fauteuil devant ma maison, une tasse de café fumante je relis encore la lettre comme si elle était un trublion dans le calme qui règne désormais dans ma vie. J'ai souvenir de cafés bien moins bons, d'un chargeur que je remplis balle après balle avant même d'avoir finis mon petit déjeuner, de lettres d'une petite amie qui me disait qu'elle regrettait de me quitter ainsi. Je suis mal placé pour la blâmer, j'ai passé plus de temps à l'étranger que dans le pays dans les six dernières années, rien le droit de lui dire de ce que je faisais, je peux comprendre que ça finit par être long. Cette lettre pourtant est différente des autres et si le papier entête n'était pas aussi soigné, que la signature avait été un tampon et non une vraie signature je crois que je n'aurais jamais dis que je viendrai à l'entretien. Ca me semble étrange quand même, qu'est-ce qu'une entreprise de jeux vidéos peut vouloir à un ancien des forces spéciales ? Une seule façon de le savoir. Je pose la lettre, relisant encore une dernière fois l'adresse et l'heure de l'entretien, comme si je ne connaissais pas encore cela par cœur. Je m'habille en conséquence même si ma penderie ne contient pas vraiment le nécessaire pour ce genre d'entretien. Ce sera donc un jean, une chemise et un gilet sans manche par-dessus. Moyen de locomotion pas vraiment adapté non plus, une moto, tant pis pour ma coiffure, de toute façon je ne suis pas vraiment sûr d'entrer dans les critères de ce qu'ils pourraient éventuellement rechercher. Erreur de personne ? Maladresse de facteur ? J'y crois encore pour tout dire. Finalement prêt je me mets en route, me demandant sur quoi j'allais tomber.
C'est loin d'être un petit building ça mais il en faudra plus pour m'impressionner. Trouvant une place pour me garer je m'avance vers le bâtiment peut-être même un peu trop décontracté pour tout dire mais au final, ne suis-je pas celui qu'on a demandé et non l'inverse ? Pourquoi serai-je nerveux alors qu'on m'a demandé de venir ? J'ignore exactement la nature de l'offre qu'on veut me faire, du poste qu'on veut me proposer, j'ignore exactement ce qu'on peut attendre de moi, je n'ai donc aucune raison de m'angoisser et puis pour quelqu'un ayant vu des tirs et des grenades, un entretien d'embauche ce n'est pas grand chose. Porte automatique qui s'ouvre et je m'avance vers le bureau d'accueil qui m'indique un ascenseur et un étage. Quatorzième étage. Ascenseur. Je fais les ascenseurs. Pas une histoire de claustrophobie, une autre histoire. Je trouve des escaliers et préfère les emprunter de toute façon je suis en avance d'une petite dizaine de minutes. J'approche de la secrétaire en tâchant d'avoir un sourire sur le visage bien que je m'interrogeais beaucoup plus qu'autre chose :
« Bonjour, Duncan Curtis, on m'a convoqué pour un entretien d'embauche à dix heures trente. »